Coaching et transfert
Quand nos envies débordent

Dans un accompagnement, il arrive que nous encouragions notre client à prendre des risques. Créer son activité. Prendre la parole. Se positionner avec clarté. Et parfois, si l’on prête attention, on peut percevoir dans cette impulsion une autre dynamique : le reflet discret d’un élan que nous n’avons peut-être jamais pleinement assumé.
Transfert et contre-transfert
Ce phénomène trouve une résonance dans deux concepts-clés issus de la psychanalyse : le transfert et le contre-transfert. Introduits par Freud, puis largement développés par Jung et d’autres, ils décrivent la manière dont une personne peut projeter inconsciemment sur une autre des émotions, des attentes ou des histoires issues de son passé. Le client transfère sur le coach des figures d’autorité ou des relations anciennes ; en retour, le coach peut, sans s’en rendre compte, réagir en fonction de son propre vécu.
« Rien n’a une influence psychologique plus forte sur l’environnement, et en particulier sur les enfants, que la vie non vécue des parents. » — Carl Gustav Jung (source)
Transposée à la relation de coaching, cette observation souligne un risque discret mais réel : celui d’utiliser le client pour combler un manque personnel, ou de l’orienter vers un chemin que nous aurions voulu emprunter.
Ce que cela implique pour le coach
Ces phénomènes sont d’autant plus puissants qu’ils sont subtils. Dans une relation asymétrique comme celle du coaching, le contre-transfert — c’est-à-dire la réponse émotionnelle du coach au transfert du client — peut passer inaperçu. Il peut s’exprimer par une forme d’attachement au résultat, un excès d’empathie, ou au contraire une posture de distance protectrice. L’ouvrage de Patrick Casement, Further Learning from the Patient, explore finement ces zones grises où l’accompagnant devient partie prenante du processus, parfois malgré lui.
Le coach peut projeter sur son client des attentes, des blessures, des regrets. Cela ne fait pas de lui un imposteur. Mais cela exige de lui lucidité, humilité, et parfois un pas de côté. Ce pas, c’est celui de l’auto-observation. Il s’agit de s’arrêter, de s’interroger sur ce que cette situation vient réveiller. Suis-je en train d’aider mon client à explorer ce qui est juste pour lui — ou ce qui aurait été juste pour moi ?
Dans les approches systémiques ou analytiques du coaching, ces questions sont centrales. Elles appellent non seulement de la vigilance, mais aussi un espace de supervision ou de co-vision pour pouvoir les examiner sans complaisance. Comme le rappellent les experts du coaching supervisé, ce que le coach ne voit pas en lui-même finit souvent par se manifester dans la relation.
Conclusion
Coacher, c’est s’exposer à des dynamiques complexes. Il arrive que des éléments de notre histoire personnelle influencent, à notre insu, notre posture ou nos interventions. Ce n’est pas un défaut, mais une réalité humaine. Ce qui importe, c’est notre capacité à repérer ces mouvements, à les questionner avec honnêteté, et à rester centré sur ce qui est utile au client.
Voir aussi : Les impacts du coaching