De la difficulté de changer

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De la difficulté de changer

 

L’installation « My Bed » (1998) de Tracey Emin, exposée à la Tate Gallery, confronte le spectateur à une scène intime et dérangeante. Un lit défait, entouré de mégots, de bouteilles vides et d’autres détritus personnels, témoigne d’une période tumultueuse de la vie de l’artiste. Au-delà de son aspect provocateur, cette oeuvre illustre avec force la difficulté du changement personnel.

 

My Bed - Installation Tracey Emin

Le lit d’Emin, dans son désordre figé, symbolise l’inertie qui nous maintient souvent dans des situations inconfortables mais familières. Il évoque ces habitudes que nous savons néfastes mais dont nous peinons à nous défaire : une relation toxique, un travail insatisfaisant, ou des comportements autodestructeurs. Ce confort paradoxal dans l’inconfort est un phénomène bien connu des psychologues, qui le nomment « zone de confort ».

 

Pourtant, le changement s’impose comme une nécessité, tant au niveau individuel que collectif et c’est aujourd’hui un poncif que d’affirmer que l’adaptabilité est une compétence primordiale. Les entreprises, confrontées aux défis du siècle – digitalisation, crises sanitaires, enjeux environnementaux – doivent repenser leurs modèles et leurs pratiques.

 

Face à ces enjeux, diverses approches ont été développées pour faciliter le changement comportemental :

  • Le « nudge« , concept popularisé par Richard Thaler et Cass Sunstein, propose d’influencer les choix des individus par des incitations douces, sans contrainte ni sanction. Un exemple classique est le repositionnement des fruits à hauteur des yeux dans une cafétéria pour encourager une alimentation plus saine. Cette approche subtile a montré son efficacité dans divers domaines, de la santé publique à l’épargne retraite.

  • La théorie des « tiny habits » (petites habitudes) de BJ Fogg, quant à elle, mise sur l’accumulation de micro-changements pour créer des transformations durables. Fogg suggère par exemple de commencer par se brosser une seule dent chaque soir, plutôt que de viser immédiatement un brossage complet, pour ancrer progressivement une nouvelle habitude d’hygiène.

  • Plus récemment, Dan Ariely a mis en lumière les deux leviers essentiels du changement comportemental : la réduction de la friction et le renforcement de la motivation. 

 

Ariely démontre que la moindre barrière, aussi infime soit-elle, peut entraver un changement souhaité. Il cite l’exemple d’une expérience menée dans une pharmacie en ligne : malgré une offre de médicaments génériques gratuits pendant un an, peu de clients ont fait le changement, simplement parce qu’il fallait renvoyer un formulaire. Cette observation souligne l’importance de simplifier au maximum les processus de changement.

 

Parallèlement, Ariely insiste sur la nécessité de rendre les bénéfices du changement plus tangibles pour stimuler la motivation. Dans une étude menée au Kenya, il a constaté que l’utilisation d’une tirelire transparente doublait le taux d’épargne des participants, rendant visible l’accumulation de leurs économies.

 

Ces approches convergent vers un constat : le changement, bien que difficile, n’est pas hors de portée. Il nécessite une compréhension fine des mécanismes comportementaux et un accompagnement adapté.

 

Chez YLOS7, notre métier consiste en grande partie à provoquer des prises de conscience qui entraînent des volontés de changer, puis à accompagner le changement des comportements. Cette mission nécessite une réflexion continue sur les mécanismes du changement comportemental. Notre expérience nous prouve que si le changement est difficile, il est bel et bien possible, et qu’il amène du plaisir*. Cette conviction guide notre approche et nourrit notre détermination à innover constamment dans nos méthodes d’accompagnement.

 

Notre réflexion sur le changement de comportement est toujours en mouvement. Nous la nourrissons des dernières avancées en psychologie comportementale, des retours d’expérience de nos clients, et de notre propre pratique pour affiner continuellement nos programmes et nos méthodes. 

 

Le changement, qu’il soit personnel ou collectif, reste un défi de taille. Comme le suggère l’œuvre provocante de Tracey Emin, nous sommes souvent prisonniers de nos propres « lits défaits », de ces habitudes et situations qui nous desservent mais dont nous peinons à nous extraire.

 

Cependant, les avancées en psychologie comportementale nous rappellent que chaque petit pas compte dans cette quête de transformation. Que ce soit par des « nudges » subtils, l’accumulation de micro-habitudes, ou encore par une réflexion approfondie sur nos freins et nos motivations, nous disposons aujourd’hui d’outils variés pour dépasser la difficulté de changer et accompagner le changement.

 

L’enjeu, pour les individus comme pour les organisations, est désormais de s’approprier ces approches et de les adapter à leurs contextes spécifiques. Car le changement est porteur d’opportunités : celle de se réinventer, d’explorer de nouvelles possibilités, et finalement, de transformer notre « lit défait » en une toile porteuse de sens et de progrès.

 

cf Françoise Kourilsky « Du désir au plaisir de changer » – Voir aussi sur la difficulté de changer : changer-de-posture

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